jeudi 31 juillet 2014

Ikea (2007)





Mon histoire ressemble à ces magasins
Ingénieux avec du sens pratique
A l'emporte pièce la caisse pour tocsin
Tortueux et en sens unique

Immolé par une allumette suédoise,
Brûlant d'envie de meubler la conversation
Je l'invitai à aller boire une cervoise
En 'tout bien tout honneur' sans malversations

Je ne suis pas une armoire à glace
Mais malgré ma charpente mal achalandée
Je me fit vite de la place
Sur un baldaquin entre deux lampes de chevet

Je m'amusais alors dans le noir
A me brûler de ses halogènes érogènes
A étrenner ses charnières ses tiroirs
Dans des suées de plaisir sans gène.

Pas besoin de schéma de montage
Dans cette amourette en kit
Étagères à tous les étages,
Tout s'est monté bien vite.

Je cherchais le défaut, le vice caché,
Elle est comme ces meubles criblés de secrets,
Dans les compartiments, des rochers,
D'autres sentiments sans doute ancrés.

J'ai tout démonté avec un tourne-vice,
Tant de douceur, ce n'est pas commode,
Son âme était comme les notices:
Un plan bizarre dont on ne palpe pas la méthode.

J'étais sur un lit escamotable, à dormir debout,
A entendre ses amants gémir dans le placard,
La blonde aux yeux bleus n'était pas à son premier coup
Grattait dans ma mezzanine le cafard.

Ivre à m'en donner la gueule de bois,
J'ai laissé le meuble tomber en immondices
J'ai dévissé la vis à bois
Qui faisait tenir cet édifice.

Mon histoire sonnait le tocsin,
Tortueuse et en sens unique,
Maintenant quand j'entre dans le magasin,
C'est blasé avec le regard cynique.
Marre de l'amour à l'emporte pièce
Que l'on monte soi-même avec un tournevis,
L'amour vrai n'est fait que d'une seule pièce,
A l'épreuve du temps et des vices.

#538 / 10.4.2007